Depuis 2009, Pierre-Jean est aumônier protestant au Centre de détention de Châteaudun, près de Chartres. Chrétien engagé, il a trouvé du sens à sa vocation à l’Armée du Salut dont l’une des missions, chère à son fondateur William Booth, se résume ainsi : « Tant qu’il y aura des hommes allant en prison, et qui n’en sortent que pour y retourner, je me battrai ! ».
Suivons Pierre-Jean lors d’une de ses journées en milieu carcéral.
Pour un dimanche, la journée commence tôt. Il est à peine 8 h ce matin. Pierre-Jean et Géraldine, son épouse, chargent la voiture avec tout le matériel nécessaire (piano, petite collation…) pour le culte qu’ils animeront dans 30 minutes. Le trajet en voiture est l’occasion de se recentrer, de se poser et de prier ensemble pour les rencontres du jour.
Ce « sas » entre le quotidien de la maison et la prison est important. Il leur permet de mettre de côté tout ce qui les préoccupe afin d’arriver disponibles pour ce temps de partage.
Arrivés sur place, il faut sonner à une première porte et attendre que quelqu’un ouvre. Face à ces nombreuses portes – quinze en tout – devant lesquelles il faudra faire preuve de patience, Pierre-Jean est dans une attitude positive, serein et paisible. Il salue chacun, gardien ou détenu, avec la même attention et disponibilité.
Une fois dans la salle de culte, c’est maintenant l’installation du matériel et l’attente des détenus.
« C’est chaque fois une surprise. Ils sont de toutes nationalités, de toutes origines et de toutes confessions. », raconte Pierre-Jean.
Parfois, il faut attendre que le calme revienne dans le centre carcéral, un autre défi pour rester dans une attitude paisible. Les premières personnes arrivent. Pierre-Jean les salue personnellement. Le culte démarre. « Il faut savoir adapter son discours en fonction de ce qui se passe, de l’actualité, des remarques faites par certains qui n’hésitent pas à me couper la parole pour m’interpeller. La présence de l’équipe d’aumônerie apaise bien souvent les tensions. En tant qu’aumônier, je suis comme un représentant de Dieu dans la prison, parmi les détenus. Cela doit se voir dans mon comportement. C’est une grande responsabilité. » À la fin du culte, quand il s’agit de rejoindre les cellules, l’équipe d’aumônerie est souvent remerciée. Eux-mêmes se sentent ressourcés par ce temps mis à part.
À la demande des détenus, Pierre-Jean est amené à faire des visites à d’autres occasions. Ces entretiens se déroulent en cellule la plupart du temps. « Quand j’arrive devant une cellule, je frappe à la porte et j’attends qu’on m’invite à entrer. J’adopte l’attitude de Jésus qui attend qu’on l’invite à entrer chez nous. »2* Durant la détention, le comportement de l’individu change, il se sent bien souvent infantilisé. Il est parfois difficile de capter un regard. Pierre-Jean accorde une importance toute particulière à cette rencontre. Pour être dans une attitude d’accueil, il faut être prêt à regarder l’autre, tel qu’il est, dans les yeux.
Pierre-Jean a ressenti la présence de Dieu à ses côtés à de nombreuses reprises derrière ces murs et ces portes fermées. Il est certain que Dieu le précède dans ses visites. Un détenu, placé au mitard, l’a un jour interpellé sur la possibilité pour Dieu de le pardonner et de l’aimer, lui qui avait fait des actes si répréhensibles. Pierre-Jean lui a répondu ces mots issus de la Parole de Dieu : « Regarde-moi dans les yeux et je te le dis. Au nom du Christ, si tu demandes pardon, le Christ te pardonne. »3* À cet instant précis la présence de Dieu était palpable. Le jeune homme a été bouleversé, sa vie a changé.
Être un disciple du Christ en prison, c’est être authentique et vrai dans ce qu’on dit et « artisan de paix » par ce que l’on est.
1* Prière de St- François d’Assises.
2* La Bible, livre de l’Apocalypse, ch. 3 v. 20. Jésus dit : « Voici, je me tiens à la porte, et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et qu’il ouvre la porte, j’entrerai chez lui et je souperai avec lui, et lui avec moi. »
3* Matthieu chapitre 6 verset 12.
Cécile Clément